De
par les monts, de par la plaine,
dont je connais chaque chemin,
mon bâton de frêne à la
main
par tous les temps je me promène.
Je vais où le hasard me mène,
je vais toujours avec entrain
en sifflotant quelque refrain,
dont le rythme joyeux m'entraîne.
Je suis heureux quoiqu'il advienne
et m'éveille chaque matin
sans trop songer au lendemain,
car on n'est jamais sûr qu'il vienne!
Tout me convient, rien ne me gêne.
Mon gîte est la paille ou le foin
et si le ciel est bien serein
c'est de la terre dont j'aime l'haleine.
Si ma musette n'est pas pleine,
je mangerai un bon quignon de pain
et remplacerai le bon vin
par l'eau claire de la fontaine!
Suis-je de la mauvaise graine?
Ceux que l'on nomme «les gens bien»
M'appellent vagabond ou vaurien.
Et leurs enfants, croque-mitaine.
Cela me fait un peu de peine.
Ont-ils raison? Je n'en sais rien.
Qu'importe pour qui l'on me tient,
si mon âme reste sereine.
D'autres pensent; quel phénomène
pour mener cette vie de chien
moi je fais ce qui me convient,
ce sont eux qui sont à la chaîne!
Quand je verrai la mort prochaine
je m'allongerai dans un coin
et je mourrai seul sans témoin,
sans vain regret, sans plainte vaine.
Un flic dira bah! qu'on l'emmène
personne n'aura de chagrin,
mon cercueil sera de sapin
seuls les rupins ont droit au chêne!
En attendant, de par la plaine
dont je connais chaque chemin,
mon bâton de frêne à la
main
je vais sans rancoeur et sans haine.